Marathon de Paris. "Breaking 3". C'était il y a 8 jours et c'était bien.
La préparation
J’écris ces lignes le mercredi 28 mars, à J-11 donc. Je suis à Genève pour le boulot, j’attends l’avion pour rentrer à Paris. Hier soir, j’ai fait l’ultime séance « difficile » du programme, je suis content d’en finir avec cette préparation, qui aura été tout sauf sereine.
J’ai couru mon 1er marathon en 2012, à Paris déjà. Le 8 avril, ce sera le 8ième mais seulement le 5ème en mode « as fast as possible ».
Paris 2012, 3h20.
Paris 2013, 3h07.
Sénart 2014, 3h06.
La Rochelle 2015, 3h03.
L’objectif avoué est clairement le « breaking 3 », comme déjà en 2014 et 2015. Je veux essayer « une dernière fois » ;) … Je sais que ça va être compliqué, je m’entraîne beaucoup, depuis longtemps, je ne progresse plus vraiment, ou très peu, depuis fin 2013… mais « oublie que t’as aucune chance, fonce, et sur un malentendu ça peut marcher », avec un peu de vent dans le dos :)
Lors de mes précédents programmes d’entrainement, j’ai toujours suivi la même trame, 12 semaines à 4 séances et environ 60 kilomètres par semaine. Que changer cette fois ? J’ai décidé de suivre la phase spécifique du fameux programme du team outdoor(*): 8 semaines seulement, avec beaucoup (trop) de volume, entre 80 et 140 km par semaine, sorties tous les jours, de grosses séances de seuil, mais des VMA plutôt faciles en comparaison, et des footing souvent « lents ». Bon, j’ai tenu moins d’une semaine …. :(
Avant de s’attaquer à cela, j’ai fait ma plus « grosse » année en 2017, 2400 kilomètres, consacrés au trail surtout, et puis ce merveilleux moment que fût le marathon de New-York avec Sylvie. Reprise sérieuse de la « vitesse » en décembre, avec en vue mon record personnel sur 10km, battu finalement deux fois, le 21 janvier aux 10km de Paris 14ème, en 37’25, puis 2 semaines plus tard aux foulées de Vincennes en 37’15, 10 secondes de mieux :)
Je démarre le programme le lundi 5 février. Le mardi soir il neige abondamment sur Paris, je continue à courir dans la neige, VMA et seuil inclus. Le vendredi je ressens une douleur au gros orteil gauche sans m’inquiéter plus que cela, je finis ma séance. Samedi, toujours dans la neige, c’est fatiguant. Dimanche, j’interromps la sortie longue après 16km, j’ai mal au pied même à chaud … et je suis crevé. 7 jours, 9 sorties, 110 km, … KO!
Semaine suivante, 10 km seulement … malgré des tentatives quotidiennes interrompues à chaque fois car j’ai vraiment mal au pied à froid, je redoute la fracture de fatigue, je n’insiste pas. Médecin, IRM, je n’ai qu’une burcite, cool;). Anti-inflammatoires, glaçage et autorisation de courir quand même. Et puis c’est la semaine de ski qui suit, donc repos et nouvelle semaine à 10km seulement.
Reprise entraînement « allégé » au retour, je passe sur 5 séances hebdos en ne gardant que les « qualitatives » du programme. J’ai toujours mal au pied à froid mais ça passe à chaud, sans revenir en fin de séance ni empirer le lendemain. D’autres « bobos » vont venir s’ajouter les 4 semaines suivantes mais sont a priori restés « maîtrisés » : douleur pied droit quasi identique à celle du pied gauche, contracture à l’ischio droit après le semi de Rueil, « réveil » de la fracture de fatigue de 2016 au pied gauche, et enfin inflammation du tendon du genou droit (re médicaments). Et pour la blague, je me suis brûlé la peau du pied gauche en laissant trop longtemps la glace un soir :) Bref sérénité totale…
Mais je serai a priori au départ, pour la 3ème fois sur le marathon de Paris (pour 5 inscriptions, car abandon sur blessure déjà en 2011 et 2016, « courez c’est bon pour la santé qui disaient ;) ». Au final j’ai couru 732 km depuis le 1er janvier, grosso modo la même chose qu’avant Sénart 2014 et La Rochelle 2015. Est-ce que je me sens plus fort ? Un peu plus rapide sans doute mais pas forcément plus résistant, alors on verra… Je ne pense plus qu’à ça.
A suivre.
(*) cf. la phase 2 du plan, avec 13% en moins sur les allures pour être sur un objectif 3h.
http://www.team-outdoor.fr/blog/le-plan-marathon-de-benoit-gandelot-pour-son-rp-au-marathon-de-francfort/
La course
Dimanche 8 avril, 22h30, je suis à nouveau à l’aéroport, à Roissy, à attendre un avion pour un déplacement professionnel. J’ai réussi, 2h59’16’’, je n’y croyais qu’à moitié, alors je suis très heureux, à la hauteur du défi personnel que cela représentait, et de la souffrance pendant les 12 derniers kilomètres de la course. Quand on se pousse à ses limites, ça ne peut pas être facile, ça ne l’a pas été ;)
Convaincu qu’il me serait impossible de ne pas faiblir à la fin, j’avais prévu de courir le premier semi un peu plus vite pour pouvoir me permettre… de faiblir ensuite. 3h au marathon = 14km/h = 4’15 au kilomètre.
Départ 8h27, 2’ après les élites et les préférentiels. Un peu par hasard, je me retrouve le premier à m’élancer du SAS 3h, un poil plus vite que les autres. Pendant 100m, je suis en tête, face aux Champs Elysées vides, marrant, j’aurais bien aimé trouver une vidéo de cet instant :).
Les 25 premiers km se passent comme planifié, un peu plus vite même et plutôt facilement, entre 4’11 et 4’13 jusqu’au semi (1h28’09, 23’’ d’avance sur le plan), puis 4’15.
A partir du 26ième, la période de grâce est terminée, ça avance toujours mais plus tout seul. 15’’ de plus que prévu sur le 29ième, 16’’ au 33ième, l’avance est consommée, il va falloir tenir le 4’20 prévu jusqu’au bout mais ça y’est, je suis bien dans le dur.
Je mets 29’’ de trop sur le 36ième, je ne regarde pas vraiment au 37, puis encore 23’’ de trop au 38ième. Dans ma tête, c’est fini, je suis en train d’exploser, je vais « échouer »… J’ai vraiment envie d’arrêter même s’il n’en est évidemment pas question. Changement d’objectif : « juste » battre mon record (3h03). Je décide de ne plus regarder ma montre du tout, pour ne pas me décourager plus, et de faire « au mieux ».
Les 4 derniers km se font dans un état de souffrance avancée. Je m’explique, je n’ai mal nulle part, le cœur va bien, je n’en peux juste plus du tout et mon cerveau pousse mes jambes à avancer plus vite qu’elles ne le peuvent/veulent. Sylvie est là au 39, puis au 41 où elle s’élance pour me suivre un peu, et me crie ses encouragements. Je ne dis pas un mot, j’avance, en mode machine, je ne sais plus évaluer mon allure, je sais juste que je donne tout. Un premier meneur d’allure 3h me rattrape, puis un second, tous deux partis derrière moi, génial :(….. Je rattrape finalement le second sur la ligne dans un dernier km kamikaze;) parcouru en fait en 4’02 (le plus rapide du marathon). Quand je passe la ligne, je lis 2h59 sur ma montre, je ne comprends pas, vraiment pas, mais bon… je prends ! :)
Je m’étale sur le dos au sol, en croix, un bénévole me relève rapidement, je me déplace un peu plus loin le long d’une barrière et me remets au sol pendant de longues minutes. Je réalise que je l’ai fait. J’ai rêvé tellement cet instant, à l’entraînement, toutes les nuits depuis 8 jours et même pendant les 25 premiers kilomètres, souvent avec des débordements d’émotions, mais là rien ne monte, je suis content mais surtout crevé... 2 oranges et 1.5L d‘eau plus tard, je retrouve Sylvie avec ma belle médaille. C’est fini, « ça c’est fait », juste l’histoire d’un défi entre moi et moi, sans autre sens que celui que je lui donne (lequel d’ailleurs ?).
Alors que s’est il passé pour que je me trompe sur mon allure réelle sur la fin ? Pas de certitudes mais d’après les « laps » de ma montre, le 36ième faisait 1.1 km, le 37ième 900 mètres seulement, et idem aux 38 et 39. J’ai regardé ma montre au 36, au 38, puis plus du tout, ceci expliquerait cela, une erreur de positionnement des panneaux 36 et 38 ?
En fait, en dehors des km 29 et 33, j’ai respecté mon plan tout du long, en grappillant même quelques secondes par ci par là et en faisant un dernier kilo très très rapide. Très dur donc mais le corps et le mental ont tenu.
Il y’avait du monde tout le long de ce beau parcours, il a fait beau, trop chaud pour courir, mais étant parti parmi les premiers, ça ne m’a pas perturbé significativement. A noter la « climatisation » du tunnel au niveau du Louvre, qui rendrait ce passage presque agréable.
Pour l’anecdote, je finis 891ième sur 42500 au général et 261ième vétéran1 sur 10700.
Vu de ce soir, j’arrête, c’était mon dernier marathon « compétition », objectif atteint … et trop compliqué de progresser encore. J’en referai mais plus cool, en accompagnateur par exemple. J’ai d’autres projets sportifs, plutôt en trail, avec déjà le grand raid du golfe du Morbihan fin juin (87 kilomètres).
Enfin, merci à tous ceux qui m’ont suivi et soutenu depuis janvier, ça a contribué à ma motivation.
Marc
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